Un ex militant des Brigades Rouges remet à sa place l’auteur de Gomorra
Par Enrico Porsia
www.bakchich.info, 30 janvier 2013
Vous rappelez-vous de Paolo Persichetti ? Ancien militant de Brigades Rouges, réfugié en France depuis de nombreuses années, il était prof de sociologie à la faculté de Saint-Denis…
Le soir du 24 août 2002, le professore est «kidnappé». En pleine rue, de diligents fonctionnaires de la Division nationale anti-terroriste, épaulés par leurs collègues des RG et sous le regard attentif des observateurs de l’Ucigos, la police politique italienne, embarquent Persichetti dans une voiture qui roule à vive allure vers la frontière.
Une extradition expéditive
A l’aube le prof de Saint-Denis se retrouve dans une geôle de son pays d’origine où il avait été condamné à de longues années de prison pour avoir participé, dans un autre siècle, aux Brigades Rouges. Le motif de cette extradition expéditive ? En exploitant l’émotion suscitée par les attentats aux Twin Towers et par la «lutte contre le terrorisme», le ministre de la justice italien, le très xénophobe dirigeant de la Ligue du nord Roberto Castelli, avait monté une manip’. Il avait fait croire, en exploitant la force de persuasion et d’imagination des RG, en mèche avec les cousins italiens de l’Ucigos, que Paolo Persichetti utilisait son travail à la faculté comme couverture, et l’Hexagone comme base arrière pour poursuivre des activités clandestines en Italie.
Un nouveau métier…
Toutes ces accusations se démontreront sans aucun fondement. De l’enfumage pur. Mais entre temps Persichetti se retrouvait enfermé dans un quartier de haute sécurité pour purger son ancienne condamnation, celle datant du siècle précédent.
En 2008, l’ancien prof de Saint-Denis obtient le droit d’aller travailler à l’extérieur de la prison (le soir il doit toujours dormir derrière les barreaux) et voilà que le prof de sociologie politique commence à faire ses premiers pas dans un nouveau métier.
Il devient journaliste au quotidien
Liberazione… Une profession nouvelle que Persichetti, il faut bien le reconnaître, exerce avec un certain talent. C’est ainsi, par exemple, qu’il contribue à porter à connaissance du public l’existence d’une équipe de fonctionnaires un peu spéciaux… Ils se baladaient dans les prisons de la péninsule pour administrer des
tortures aux détenus politiques!
Persichetti s’intéresse aux questions de société. En 2010 il attire l’attention de ses lecteurs sur une dure polémique qui oppose Roberto Saviano à Umberto Santino, le président du Centre sicilien de documentation Impastato. Une
association anti mafia très active en Sicile qui porte le nom de Peppino Impastato, militant d’extrême gauche, journaliste et animateur de radio Aut. La radio indépendante dérangeait au plus haut point Cosa Nostra. Peppino Impastato fut assassiné en 1978 sur ordre du parrain mafieux de Cinisi, Gaetano Baldamenti.
La parole contre la Camorra… et la vérité officielle
En 2010,
l’association de Umberto Santino a
mis en demeure l’éditeur de Roberto Saviano, l’auteur de
Gomorra, le symbole le plus médiatique de la lutte anti-mafia, de rectifier des passages contenus dans son livre
La parola contre la camorra. En effet des «
inexactitudes historiques» sont présentes dans le récit que fait le romancier Saviano sur les circonstances qui ont permis de relancer en 1998 l’enquête sur l’assassinat de Peppino Impastato. Selon la narration de Saviano l’enquête sur l’assassinat du journaliste de radio Aut, auraient été relancée grâce à la sortie d’un film: «
I Cento passi»( Les cent pas) qui retrace la vie de Impastato…
Difficile de le croire quand on sait que le film est sorti en 2000 alors que l’enquête sur l’assassinat du journaliste avait été relancée deux ans plus tôt et ceci grâce à la diligence du Centre de documentation qui porte son nom ainsi qu’aux témoignages du frère et de la mère de Peppino. Un long et difficile combat, parsemé de menaces et de pièges… Comme l’a très précisément relaté la commission parlementaire anti-mafia… Quand le corps de Peppino Impastato fut retrouvé, aussi bien les carabiniers que certains magistrats s’empressèrent d’orienter l’enquête vers une fausse piste. Impastato, le journaliste gauchiste, se serait fait sauter avec sa propre bombe alors qu’il cherchait à commettre un attentat.
Cette «vérité officielle» arrangeait le pouvoir alors en place. Un opposant au système de la Démocratie Chrétienne était éliminé, les «rouges» étaient criminalisés et le boss mafieux de la région, Gaetano Baldamenti, pouvait continuer à gérer tranquillement ses affaires tout en affirmant ses liens avec la Démocratie Chrétienne. Ce partie gouvernait le pays, sans alternance possible, depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Un véritable régime qui veillait jalousement sur la vérité officielle à servir au peuple.
Et pourtant… le travail tenace et sans relâche de l’association dirigée par Santino, qui organisa déjà en 1979 la première manifestation populaire contre l’emprise de la Mafia en Sicile, obligea, enfin, la justice à réouvrir une enquête qui était destinée à être classée aux oubliettes.
Une longue enquête qui a pu aboutir au bout de 22 ans d’efforts à la condamnation du boss mafieux Gaetano Baldamenti.
L’auteur de Gomorra est susceptible
Mais qu’à cela ne tienne. L’auteur de Gomorra est susceptible et…infaillible! L’éditeur de Saviano menace donc de poursuites le Centre sicilien de documentation Impastato, l’association qui s’est battue pendant 22 ans afin que la vérité éclate, si elle s’obstine à polémiquer sur ce passage inexacte de l’écrivain prodige, qui est devenu l’icône de la lutte contre la mafia au nom de l’Etat italien.
Un Etat italien qui a pourtant démontré, à maintes reprises, qu’il savait se mélanger dangereusement avec Cosa Nostra…
A la lecture de
l’article signé par Paolo Persichetti sur
Liberazione, qui relate de la rectification demandée par le Centre sicilien de documentation, Saviano pique une noire colère. Il est vrai que dans son papier Persichetti rappelle aussi comme dans un autre livre, «la Bellezza e l’inferno», Saviano s’était fait un devoir de citer une conversation téléphonique qu’il aurait eu en 2004 avec la mère de Peppino Impastato… une conversation qui n’aurait jamais existé,
si non dans la fantaisie du romancier, tout au moins selon les proches de madame Impastato (décédée entre temps) cités par Persichetti. Face à de telles accusations, «
Nier l’existence de cette conversation ne constitue pas une critique, mais une attaque qui tend à jeter un trouble sur mon propre engagement social et civil»,
Saviano porte plainte.
L’ex-militant des Brigades Rouges, en prison la nuit et journaliste le jour, ainsi que Dino Greco, le directeur responsable du quotidien Liberazione sont invités à la barre par l’écrivain à succès.
Malheureusement pour l’auteur de Gomorra… les juges ne l’ont pas suivi (lire ici). Le 21 janvier le juge Barbara Càllari, classe purement et simplement la plainte (lire ici). Les journalistes étaient dans leur droit. Saviano qui a déjà été accusé de plagiat et d’inexactitude dans ses récits aux sources invisibles, ne peut plus esquiver les critiques.
Liberazione avait le
droit de contredire et de critiquer l’icône de l’anti-mafia…. moralisatrice et bien pensante.
«Saviano est désormais une griffe, une sorte de machine médiatique»
Dans son article Persichetti posait en effet aussi des questions «sur le rôle d’administrateur de la mémoire de l’anti-mafia attribué à Saviano par des puissants groupes de presse.» Il soulignait aussi que «le niveau inquiétant d’osmose rejoint pas Saviano avec les enquêteurs» fait en sorte que l’auteur de Gomorra se soit «transformé en divulgateur officiel des parquets anti-mafia et de certains services de police». Enfin, Persichetti concluait «Saviano est désormais une griffe, une sorte de machine médiatique» qui incarne une conception diamétralement opposée «à celle de l’anti-mafia sociale pratiquée par Peppino Impastato. La vérité sur son assassinat a été longuement cachée grâce au brouillage des pistes opéré par les carabiniers et la magistrature. Une histoire que visiblement le dispositif Saviano ne peut pas raconter».
Peppino impastato devant radio Aut en Sicile (DR)
Le Centre sicilien de documentation Impastato se félicite aussi de la décision de justice et attend encore que l’éditeur de Saviano rectifie les inexactitudes historiques apparaissant dans les ouvrages du héros littéraire de l’anti-mafia italienne. Requête légitime ou bien blasphème?
Sur l’affaire Impastato-Saviano
Filippo Facci – Caso Impastato, Saviano perde la causa contro l’ex-br
Liberazione.it – Criticare Saviano è possibile
www.articolo21.org: Archiviata la querela di Roberto Saviano contro il quotidiano Liberazione
“Persichetti ha utilizzato fonti attendibili”, il gip archivia la querela di Saviano contro l’ex brigatista
Filippo Facci – Caso Impastato, Saviano perde la causa contro l’ex-br
Liberazione – Criticare Saviano è possibile
La bugia e la camorra. La madre di Peppino Impastato non parlò con Saviano
Corriere del mezzogiorno – La madre di Peppino Impastato non parlò con Saviano. Persichetti vince la causa
“Non c’è diffamazione”. Per la procura la querela di Saviano contro l’ex brigatista in semilibertà va archiviata
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