Brescia, le gant cache-misère

Politiques ségrégationnistes en Italie du Nord

par Lynda Dematteo

En Italie du Nord, les transports publics focalisent les tensions, car ce sont des lieux de promiscuité sociale. Lors de mes nombreux séjours en Lombardie, il m’est arrivé d’être prise à partie par des voyageurs impatientés par l’incivilité des étrangers. Les Italiens qui en ont les moyens ont depuis longtemps cessé de fréquenter les transports collectifs, leur préférant de loin la voiture ou le scooter. La détérioration matérielle des wagons, des rames et des bus n’y est pas non plus étrangère. Ils sont parfois tellement sales qu’on se demande où s’asseoir et d’appuyer la tête sur les reposoir prévu à cet effet. Le réseau des transports publics de Lombardie, l’une des régions les plus riche d’Europe de l’Ouest, s’apparente ainsi aux moyens de transport des pays pauvres. Le gant prophylactique cache en réalité la misère des transports publics italiens. Attendre un bus, monter dans un tram, prendre un train de banlieue ne font plus partie des habitudes de nombreux Lombards. Cela serait déchoir socialement. En effet, leurs usagers sont, pour l’essentiel, les plus fragiles socialement: les retraités, les jeunes travailleurs étrangers et les étudiants dont les parents n’ont pas les moyens de leur offrir une vespa. De ce point de vue, la capitale de la mode va plutôt à l’encontre de la tendance, car cette réalité n’est pas sans poser des problèmes d’ordre environnemental: l’Italie du Nord est aujourd’hui l’espace qui concentre le plus grand nombre d’automobiles au monde (en moyenne trois moyens de locomotion par foyers). La voiture est un bien de consommation surinvesti socialement, un véritable status symbol comme les Italiens le disent eux-mêmes, et ils n’hésitent pas à s’endetter pour acheter des Suv et des berlines station wagon dont la consommation d’hydrocarbure est très élevée. Lorsque l’on jouit chaque jour de l’extension et la capillarité du réseau parisien, il est difficile d’imaginer la réalité du réseau de la capitale économique italienne. Le réseau du métro est insuffisant (trois lignes), même s’il est en partie compensé par l’ancien réseau des tramways. Les vieux trams, très étroits, avec leurs bancs lustrés par l’usage et le temps, sont un symbole identitaire fort pour les milanais. Ce réseau est perçu comme un héritage austro-hongrois dans la mesure où ce moyen de transport collectif s’est surtout développé et perpétué dans les villes d’Europe centrale. Les trains de banlieue ne sont pas suffisamment nombreux et leurs horaires sont souvent aléatoires. Les travailleurs qui chaque jour passent plusieurs heures dans les transports sont perpétuellement au bord de la crise de nerfs et ne cessent d’alerter, en vain, les représentants des collectivités territoriales. La cohérence du réseau des transports publics à l’échelle de la Région ne semble pas faire l’objet d’études. On préfère élargir les autoroutes qui enserrent Milan. Malgré cela, les engorgements sont constants. En cas, d’intempéries, les cadres préfèrent réserver des chambres dans les hôtels qui bordent les artères ; ils savent que ce soir, le mauvais temps les empêchera de regagner leurs foyers dans les provinces environnantes. Demain, ils repartiront directement au bureau. Les plus malins, se sont déjà équipés de lit de camp et dormiront sur place. Les élus de la Ligue du Nord exploite la grogne sans vraiment chercher de solutions. Récemment, le député Matteo Salvini de la Ligue du Nord a proposé à l’Atm de réserver des places aux milanais sur les transports publics du réseau urbain. Selon lui, «qui prend le bus, le métro ou le tram, préfèrerait souvent se trouver ailleurs compte tenu de la mauvaise éducation, de l’arrogance et de la violence à laquelle il doit faire face tous les jours à cause surtout des étrangers et des clandestins». Il propose même de réserver des rames pour les femmes italiennes et étrangères qui ont renoncé à prendre les transports en commun à cause des attouchements qu’elles y subiraient (7mai 2009, Sky tv 24). Les mesures ségrégationnistes avancées par cet élu de la Ligue du Nord évoquent un racisme que l’on pensait pourtant définitivement révolus depuis l’abolition de l’apartheid en Afrique du Sud. Le corps humain est un symbole de la société comme nous l’enseigne l’anthropologue britannique Mary Douglas dans son ouvrage classique De la souillure, “la saleté est attribuée aux étrangers qui s’attaquent aux points faibles de la structure” (p.131)

Racisme dans la ville de Brescia. Des gants pour les passagers qui utilsent le bus des immigrés

«Bien utile contre les risques de contagion». Une initiative conçue par une agence publicitaire et promue par la Mairie

Paolo Persichetti
Liberazione
, 6 juillet 2010, Rome

C’est un véritable gant de défi que l’administration communale a lancé aux transports publics de la ville de Brescia. Un gant – expliquent Nicola Orto, le Conseiller communal chargé des transports, et Andrea Gervasi, le Président de Brescia Transport – pour se protéger du contact direct avec les barres d’appui et les manettes présentes dans les bus sur lesquels montent chaque jour des milliers de personnes parmi lesquelles, l’allusion est évidente, beaucoup d’étrangers et d’immigrés. Les mots d’ordre sont donc protection, crainte, peur du contact quel qu’il soit, avec les étrangers, les autres, avec l’humanité en tant que telle, surtout  souffrante. Plus que d’un Bureau de la Mobilité (intitulé qui devrait rimer avec mixité, contamination), l’initiative semble provenir du Bureau de la Paranoïa. Aucune raison d’hygiène publique ne saurait justifier une telle mesure. Il n’y a aucune épidémie ou pandémie de contact dans l’air, en revanche il y a un virus idéologique de type raciste qui cherche les voies les plus perfides pour s’insinuer en se camouflant au prix des justifications les plus grotesques. S’il est dangereux de s’accrocher aux barres des autobus, figurez-vous combien il peut être contagieux de manipuler l’argent qui passe de mains en mains (en vérité, en nombre limité et toujours les mêmes). Si la logique c’est celle-ci, pourquoi ne pas se prémunir aussi des billets de banques avec un beau dispositif prophylactique pour des doigts que l’on retirerait à la banque? Pecunia non olet, l’argent ne pue pas et il n’est pas non plus contagieux. La contagion suit d’autre voie, c’est bien connu, elle prend la ligne 3, c’est-à-dire l’autobus qui part de la Badia et traverse Brescia en passant par les quartiers à forte densité populaire pour arriver à Rezzato, une commune en périphérie. Comme par hasard, il s’agit de l’un des moyens de transport les plus utilisé par la population immigrée. Le risque de contagion suit donc les voies de la haine sociale à l’égard des plus désavantagés. Le projet est encore dans sa phase expérimentale: pendant un mois, à côté des machines à oblitérer, les usagers trouveront  un distributeur métallique qui dispensera gratuitement des gants; s’ils manifestent leur satisfaction, le dispositif sera étendu à tout le réseau urbain. Outre le fait d’offrir «de majeurs opportunités en terme de santé publique», expliquent les promoteurs de l’initiative, l’usage du gant représente également un nouveau «moyen de communication externe à haut degré d’échange et de partage de messages publicitaires». Porté comme un préservatif à mains, ce gant serait également utilisé pour dialoguer directement avec les citoyens et véhiculerait les annonces publicitaires des établissements intéressés. Sur cette surface apparaîtrait chaque jour des informations et des annonces variées. L’objectif principal – avancé par les concepteurs de ce produit baptisé Ovni, quelques enseignants et étudiants du Machina Lonati Fashion, un institut de design de Brescia lié aux Beaux Arts de Santagiulia – «serait de d’assurer une diffusion homogène et cohérente de l’image de l’entreprise à travers la publicisation de son activité, de ses services, de ses orientations et d’évènements culturels. Ceci afin de renforcer la crédibilité de l’entreprise elle-même, laquelle en retirera un surcroît de transparence et de visibilité». Sur un point, les designers ont raison, le gant est une «nouvelle forme de communication directe avec les citoyens, dans la mesure où il est possible de la porter directement sur soi». Il diffuse un racisme subliminal, banalise les sentiments les plus troubles de l’être humain. Mais que les belles âmes se rassurent, le préservatif à mains ne pollue pas, «il est écologique, réalisé dans un matériau 100 % biodégradable pour le plus grand respect de l’environnement ». Vraiment très intéressante cette nouvelle conception de l’écologie qui voit les personnes contraintes d’émigrer comme des scorie de la nature. Certains soutiennent que dans les années 1980 le design aura donné une forme plastique au vide pneumatique engendré par la mort des idéologies. À Brescia, le design fait un pas en avant, il ne donne plus sens au vide en lui donnant forme, au contraire, il diffuse de manière sinueuse des idéologies grossières chargées de haine. Il maquille le rejet.

Migranti: i dannati della nostra terra

Libri – I dannati del lavoro. Vita e lavoro dei migranti tra ossessione del diritto e razzismo culturale, Renato Curcio, sensibili alle foglie pp. 136, euro 14

Paolo Persichetti
Liberazione 3 luglio 2008

Parole semplici che raccontano storie terribili sono quelle raccolte da Renato Curcio nella sua ultima ricerca sociale sul lavoro migrante. I «dannati della terra», espressione impiegata da Frantz Fanon in un testo del 1961 per indicare la moltitudine degli esclusi, sono diventati oggi quei dannati del lavoro che danno titolo al volume edito da Sensibili alle foglie ( I dannati del lavoro. Vita e lavoro dei migranti tra ossessione del diritto e razzismo culturale , pp. 136, euro 14).
 Donne e uomini, persone con valigie cariche di storie e non reati ambulanti. «Imprenditori dei sogni», come dovremmo in realtà chiamarli se fossimo in grado di frantumare gli occhiali deformanti dell’opposizione regolari/irregolari. Una scena imponente di milioni di umani che da città e villaggi di ogni continente si mettono in viaggio animati dall’immaginazione di un futuro diverso da quello disegnato per tutti noi dai consigli di amministrazione delle aziende globali. «Umani non ancora infettati dalla “codificazione feticistica” che come un virus epidemico sta spegnendo il pensiero della discontinuità negli autoctoni del Vecchio continente». Umanità ancora umana che non sa che farsene dei piccoli sogni a “prezzi mai visti” smerciati da Carrefour. C’è altro e di meglio in ciascuno di loro, scrive Curcio: «l’energia di chi pensa ancora la crescita non soltanto come una variabile economica[…] di chi rivendica per sé il diritto primordiale a esistere, prima di ogni legge degli uomini, prima del capitale, prima del mercato, prima delle carnivore ambizioni delle imprese globali». 
Loro, i migranti, sanno di non essere più radice ma vento. Sopravvissuti a viaggi spaventosi, le loro radici sono ormai gambe che spostano il mondo, scirocco e grecale, libeccio e levante. Solcano autostrade, passano valichi e navigano mari, s’ingegnano a trovare sempre nuovi cammini, molti muoiono lungo strade di stenti, sui sentieri del deserto oppure naufraghi nel cimitero liquido dei mari. Approdano sulle rive ridotti a scorie di mareggiate, pasti avanzati dei pesci impigliati alle reti. Dal 1998 sono già diecimila gli annegati nel Mediterraneo e nell’oceano Atlantico, tremila i dispersi. Trecento, quelli schiacciati, soffocati o congelati negli interstizi più assurdi ricavati nei camion della speranza.
L’avventura del lavoro migrante, la scelta del viaggio “intemerato” non nasce in luoghi lontani ma inizia da noi. Sono le aree più obese del mondo, quelle in cui operano i grandi centri capitalistici che creano quella sorta di vuoto d’aria che attira gli sciami migranti delle aree più spolpate del pianeta. L’impossibilità d’accedere alla via regolare, dovuta ai costi esorbitanti della corruzione e della speculazione che presiede i circuiti dei consolati, un sottobosco d’agenzie ufficiose, di piccoli faccendieri, mediatori e furbastri d’ogni genere pronto a lucrare su ogni passaggio burocratico, spiega la scelta della via “irregolare”, quella delle barche che giustamente Curcio rinuncia a definire «illegale» per non farsi complice della discriminazione che poi andrà a estendersi sull’intera vita di chi ne diverrà il bersaglio.
 Sono le nuove modalità del capitalismo attuale, delle grandi aziende che progettano se stesse a misura del mondo, insieme alla centralità produttiva assunta da paesi privi di normative sul lavoro che spiegano il fenomeno migratorio. Questo processo, che vede aziende extraterritoriali organizzare il movimento di merci, capitale e persone, serba nel suo seno una grande contraddizione: mentre la libera circolazione delle merci non trova ostacoli soltanto il movimento umano suscita rigetto. Tutto si sposta, ma solo le persone in movimento impauriscono. Tuttavia una soluzione andava trovata perché i limiti posti alla circolazione delle persone compromettono le capacità di consumo interno. Così il trattato di Schengen, entrato in vigore nel 1995, ha introdotto un doppio binario, un’area di privilegio comunitaria che ha però il suo rovescio nell’emergere immediato di una zona parallela, quella degli “illegali”, dei “clandestini”.

Cambia in questo modo la nozione di frontiera. Il confine visibile scompare ma al suo posto nasce la fortezza. Una fortezza Europa armata di banche dati integrate sempre più specializzate, come il sistema informatico Schengen (Sis) che include informazioni su cose e persone.
 L’antico presupposto della fortezza medievale era il ponte levatoio, la presenza comunque d’un passaggio all’esterno. Al contrario l’Europa fortezza si costruisce come una rocca senza aperture. La rete di centri di permanenza temporanea (Cpta, Cpa, Cid), destinati a divenire dopo l’ultimo “pacchetto sicurezza” varato dal governo Berlusconi “Centri di identificazione ed espulsione”, più che materializzare i confini interni interrompono la tradizionale continuità territoriale sulla quale posava la vigenza del diritto nazionale, sancito dal combinato disposto degli articoli 3 e 5 della costituzione. Un diritto a macchia di leopardo, dei territori di sospensione delle garanzie costituzionali emergono dando luogo a uno stato di diritto stratificato. Al tempo stesso, come in un gioco di prestigio, la nozione di “sicurezza” è sovrapposta a quella di “regolarità”. In questo modo “l’irregolarità amministrativa” diventa una forma di clandestinità presto sanzionata come un reato.
Tecnicamente l’internamento amministrativo, la carcerazione senza reato, che contraddistingue la rete dei centri di permanenza, appartiene alla tradizione del sistema dei campi di concentramento. Ma la vera caratteristica di questi nuovi luoghi d’internamento temporaneo è il fatto d’essere divenuti dei centri di raccolta per rastrellamenti di forza-lavoro semischiavizzata. Il sistema dei centri di permanenza appare dunque funzionale alla formazione di una nuova «sottoclasse di lavoratori», figlia della nuova e perversa relazione che si è stabilita tra stratificazione del diritto e forme estreme (extralegali) di flessibilità e precarietà del mercato del lavoro. Nasce in questo modo una classe di lavoratori completamente priva di diritti, sospinta alla «clausura di un trattamento quasi-schiavistico», una forma di mercificazione selvaggia e di alienazione totale delle esistenze umane eccedenti, posta ben al di là delle stesse condizioni che caratterizzano il “lavoro nero”. Messi nella situazione di non poter trattare alcunché, queste forme neoschiavistiche di lavoro segnalano la «caduta dal piano del diritto a quello del patto. Tra il datore di lavoro e il lavoratore si stipula, in altre parole, un contratto privato, molto simile a un “patto d’omertà”, in cui ciò che viene dichiarato (l’apparenza, appunto) è pura menzogna mentre ciò che viene taciuto è una sostanziale violazione delle leggi». Una condizione umana radicalmente esclusa e continuamente esposta a rotolare nell’abisso dell’internamento. Oltre a garantire la massima valorizzazione del capitale, questo «lavoro dannato» condiziona anche l’intero mercato del lavoro e diventa una minaccia permanente verso le altre fasce precarie e flessibili ancora dotate di un minimo di diritti e capaci di opporre forme di resistenza. È la vecchia storia, sempre attuale, dell’esercito proletario di riserva. L’Italia, poi, ha conosciuto la minaccia della precarietà fin dall’operaio massa meridionale dei primi anni 60.
 Al pari della precarietà, anche il razzismo è un conto mai chiuso. “Indesiderabili” è la parola chiave degli attuali Cpt, come lo fu per il legislatore fascista dopo l’introduzione delle leggi razziali del 1938 e che due anni più tardi provocarono l’apertura di oltre 200 campi di concentramento. In una circolare inviata dal ministero degli Interni si poteva leggere: «Detti elementi indesiderabili apportatori di odio contro i regimi totalitari, capaci di qualsiasi azione deleteria, per difesa dello Stato et ordine pubblico vanno tolti dalla circolazione». 
Nel frattempo però il razzismo ha mutato aspetto. A quello biologico si è sostituito un «razzismo culturale» fondato su un preteso differenziale tra civiltà. Questo razzismo, spiega Curcio, ha una intrinseca valenza politica legata alla “costruzione della paura”. La percezione dell’insicurezza viene impiegata per orientare la rabbia verso bersagli di comodo, senza diritti e totalmente deboli, come è il caso dei Rom. Ma questo “sentimento” nasce da un moto reale di consapevolezza dei lavoratori di fronte a un destino precariamente sospeso. Trasformare questa domanda di sicurezza in razzismo è l’operazione politica in corso, quella da ribaltare completamente. Il paradigma reazionario, oggi egemone, è riuscito modificare il modo di produzione dell’immaginario facendo apparire lo sfruttamento più brutale come una forma di diversità, uno stigma, quando nella realtà è proprio lo sfruttamento che ci rende stranieri. 
Rimettere al centro dell’attenzione culturale e politica la critica del lavoro, a partire dai suoi aspetti più bestiali, è una delle strade obbligate che la sinistra deve ritrovare se vuole tornare a esistere.

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